11. juin 2025 de Attila Boka
IA agentique : de quoi s’agit-il et comment fonctionne-t-elle ?
Qu’entend-on par « IA agentique » ?
L’IA agentique (ou « Agentic AI » en anglais) désigne des systèmes d’intelligence artificielle capables d’agir comme des agents numériques autonomes. Contrairement aux systèmes classiques, fondés sur des règles fixes ou des instructions explicites, ces agents poursuivent un objectif de manière indépendante, analysent leur environnement, évaluent différentes options et prennent leurs propres décisions. Leur fonctionnement repose sur les données, le contexte et l’expérience, avec l’intention non seulement de réagir, mais aussi d’anticiper et d’agir de façon proactive.
Ces systèmes ne se reposent pas sur un seul modèle d’IA : ils orchestrent un ensemble d’outils, d’API et de logiques décisionnelles afin de remplir leurs missions. L’humain définit les objectifs et le cadre d'action. L’exécution opérationnelle est ensuite prise en charge par l’IA agentique. Cette capacité à déléguer la poursuite d’objectifs opérationnels positionne l’IA agentique comme un concept stratégique central pour les architectures d'entreprise modernes.
Qu'est-ce qui distingue l’IA agentique de l'IA classique ?
L'IA classique fonctionne de manière réactive. Elle analyse des données, reconnaît des modèles et fournit des prédictions ou des recommandations en réponse à des requêtes spécifiques. Elle reste toutefois dépendante de la saisie des données et des processus prédéfinis.
L'IA agentique, quant à elle, poursuit activement un objectif. Elle planifie, agit et apprend de manière continue. Un agent est ainsi capable de décider lui-même quand une analyse est requise, s’il faut collecter des informations supplémentaires ou si une interaction doit être déclenchée, sans que chaque étape soit définie en amont par un humain.
Pour les entreprises, cela marque un changement de paradigme notable : on passe d’une intelligence ponctuelle (ex. : « Quel client risque de partir ? ») à une capacité d’action continue (ex. : « Comment renforcer proactivement la fidélité de nos clients ? »).
Pourquoi les agents autonomes gagnent-ils en importance ?
Plusieurs évolutions récentes renforcent à la fois la pression et les conditions favorables à l’émergence de l’IA agentique :
- Progrès réalisés du côté des modèles : les modèles de base tels que les LLM ou l'IA vocale fournissent une base sémantique et contextuelle robuste. C’est cette avancée qui rend possible, pour la première fois à grande échelle, des interactions agentiques.
- Nécessité économique : les entreprises doivent davantage automatiser leurs processus, tout en les rendant plus agiles et résilients. C’est ici que l'automatisation traditionnelle atteint ses limites.
- Intégration technologique : les API, les services cloud, les plateformes de données et les systèmes CRM sont désormais plus faciles à connecter entre eux. Ainsi, les systèmes d'IA agentique peuvent exploiter toutes les informations.
- Capacités de raisonnement avancées : comme en témoignent les modèles linguistiques actuels, tels que ChatGPT (OpenAI), Claude (Anthropic), Gemini (Google DeepMind) ou LLama (Large Language Model Meta AI), les systèmes agentiques modernes sont de plus en plus capables d'analyser des relations complexes, d'en tirer des conclusions logiques et de prendre des mesures pertinentes. Cette capacité va bien au-delà du principe classique de question-réponse et constitue la base de l'automatisation effective des processus décisionnels critiques pour l'entreprise.
- Modification des attentes côté utilisateur : les unités commerciales et les utilisateurs finaux sont de plus en plus exigeants en matière de systèmes. Non seulement, ces derniers doivent être capables d’assister, mais également d’agir de manière proactive et de prendre des responsabilités, par exemple pour prioriser des tâches, gérer des risques ou proposer des options décisionnelles solides. Pour la première fois, l’IA agentique offre une opportunité réaliste pour répondre à cette exigence.
- Disponibilité des appareils Plug-and-Play : la généralisation d'environnements low-code, de connecteurs API et de chaînes d'outils standardisées facilite et accélère la mise en place de solutions agentiques. Même sans cellule interne de R&D en IA, les entreprises peuvent désormais envisager une adoption de façon rentable.
L'IA agentique n'est donc pas seulement une possibilité technologique : elle est devenue une réalité économiquement viable et compatible avec les structures organisationnelles actuelles.
GenAI Impact Report 2025
Aujourd’hui, 7 cadres sur 10 en Suisse utilisent déjà l’IA générative au sein de leur activité. Et concrètement, ils gagnent en moyenne 121 minutes par semaine.
Découvrez dès maintenant notre GenAI Impact Report 2025, un livre blanc conçu pour vous accompagner dans vos décisions stratégiques, à l’ère de l’intelligence artificielle.
Comment fonctionne l'IA agentique dans le contexte des entreprises ?
Les systèmes d'IA agentique reposent sur un cycle itératif structuré en quatre étapes :
1. Percevoir : le système collecte des données issues de son environnement (états, événements, comportements utilisateurs ou réponses système) qu’elles soient structurées ou non. Ces informations proviennent, selon les cas, de sources telles que des ERP, des plateformes CRM, des API, des textes ou des capteurs.
2. Analyser et décider : sur la base des objectifs fixés, du contexte de l'entreprise et des données accumulées, le système planifie les plans d'action possibles, les hiérarchise et choisit celle qui est la plus pertinente dans la situation donnée. Il prend en compte les incertitudes, les conflits d’objectifs et les probabilités.
3. Agir : la mesure sélectionnée est exécutée de manière autonome via des interfaces techniques. Il peut s'agir d'une mise à jour de la base de données, d'un message à un spécialiste, d'une réservation dans le système ou d’un enchaînement automatisé vers un processus aval.
4. Réflexion et apprentissage : le système évalue les résultats de ses actions, intègre les retours d’expérience et adapte progressivement sa logique décisionnelle pour les prochaines fois. Cet apprentissage est continu et est basé sur les données.
Ce cycle se répète en continu. L’enjeu ? Permettre un haut degré d’autonomie, tout en conservant une traçabilité et une transparence suffisantes pour que les utilisateurs humains puissent superviser, affiner ou intervenir si nécessaire, sans avoir à valider chaque étape manuellement.
Ce qui rend cette approche particulièrement puissante, c’est la capacité croissante des systèmes à interpréter dynamiquement leur contexte d’action. En effet, ils détectent les écarts, identifient les ambiguïtés ou les objectifs non atteints et réagissent en conséquence. Cela marque la transition d’une automatisation rigide vers une orchestration adaptative, fondée sur l’apprentissage.
Quels sont les divers types d'agents et en quoi se distinguent-ils en pratique ?
Les agents peuvent être divisés en plusieurs niveaux de maturité fonctionnelle. La classification suivante aide les entreprises à choisir les types d'agents adaptés à leurs besoins opérationnels :
- Les agents réflexes réagissent instantanément aux déclencheurs selon des règles strictement prédéfinies, comparables aux solutions RPA classiques (Robotic Process Automation). Ils fonctionnent de manière déterministe, rapide et fiable, mais ne conviennent qu'à des processus simples, répétitifs et bien structurés.
- Les agents basés sur des modèles disposent d’une compréhension plus riche de leur environnement. Ils se forgent une image interne des interactions et du contexte, ils peuvent anticiper les évolutions systémiques. Ils sont utilisés, par exemple, dans l’analyse prévisionnelle des processus, l'optimisation des stocks ou la gestion dynamique de la production.
- Les agents orientés vers les objectifs planifient stratégiquement la manière d'atteindre efficacement un objectif bien défini. Ils évaluent les chemins d’action en fonction de la réalisation des objectifs et déterminent quel chemin répond le mieux à l’objectif. Ces agents sont idéaux pour des fonctions comme l’allocation des ressources, le pilotage commercial ou la planification de projets.
- Les agents orientés valeur (ou usages) prennent des décisions sur la base d'un système d’évaluation pondéré (par exemple l’évaluation coûts-bénéfices, la satisfaction client, le gain de temps). Ils sont particulièrement utiles dans des contextes où plusieurs intérêts doivent être conciliés en temps réel, comme la logistique ou les stratégies de tarification.
- Les agents d'apprentissage évoluent de manière continue à partir des retours issus de leurs propres décisions. Grâce à des approches comme le reinforcement learning ou l’optimisation adaptative, ils s’améliorent progressivement. On les déploie dans des environnements riches en données, comme la détection d’anomalies ou l’optimisation de l’expérience client.
- Les systèmes d'agents hiérarchiques, appelés aussi réseaux orchestrés, se composent de plusieurs agents spécialisés qui collaborent dans une architecture coordonnée. Chacun assume un rôle précis dans la chaîne, et l’ensemble pilote des processus complexes (par exemple dans les chaînes industrielles, les jumeaux numériques ou les plateformes de services globales).
En pratique, ces types d’agents ne sont pas toujours cloisonnés. Les projets réussis commencent souvent avec une cible bien définie, un cas d’usage clair et un périmètre fonctionnel limité…avant de monter en complexité.
Avantages stratégiques : autonomie, prise de décision et apprentissage
Contrairement aux outils d’automatisation classiques, l’IA agentique ne vise pas des gains ponctuels sur des tâches isolées. Elle s’inscrit dans une démarche structurée et durable d’amélioration des capacités de décision, de pilotage et de résilience. Voici ses principaux atouts dans un contexte professionnel :
- Autonomie : en réduisant la charge opérationnelle pesant sur les équipes, les systèmes agentiques peuvent effectuer des tâches, prendre des décisions et lancer des actions de suivi de manière autonome, que ce soit dans la relation client, la gestion des offres ou la coordination des systèmes internes. Leur autonomie reste encadrée par des règles définies, garantissant un équilibre entre délégation et contrôle.
- Capacité de prise de décision : grâce à la rapidité, la transparence et la cohérence du processus décisionnel, les systèmes d'IA agentique peuvent cartographier des arbres de décision complexes en temps réel, combiner des critères basés sur des règles et sur des données. Ils peuvent ainsi suggérer ou mettre en œuvre des options d'action bien fondées, ce qui est idéal pour les domaines d'application à haut risque, critiques en termes de temps ou fortement pilotés par les données.
- Apprentissage continu : ces systèmes ne restent pas figés. Ils s’améliorent au fil du temps grâce aux retours d’expérience, aux interactions utilisateurs et aux résultats obtenus. Cette capacité d’auto-optimisation les rend particulièrement efficaces pour piloter des indicateurs de performance clés, comme la réduction des coûts, l’amélioration des délais ou l’augmentation de la qualité.
L'IA agentique devient ainsi un élément clé de la résilience numérique, en particulier dans les environnements complexes, décentralisés ou fortement dépendants des données.
Distinction par rapport aux outils d'automatisation traditionnels
De nombreuses entreprises utilisent déjà des solutions comme la RPA, le BPM ou des moteurs basés sur des règles. Ces outils ont largement fait leurs preuves, mais montrent leurs limites face à des processus complexes, changeants ou non entièrement définissables.
Les systèmes d'IA agentique apportent quatre améliorations clés à cet égard :
- Compréhension contextuelle : là où l'automatisation classique nécessite des données parfaitement structurées et des règles fixes, les systèmes d'IA agentique, sont quant à eux capables de traiter des informations partielles ou hétérogène, d’identifier les liens pertinents, et de s’adapter au contexte. Elle s’applique ainsi à des environnements réels plus variés et moins prévisibles.
- Autonomie décisionnelle : alors que les processus RPA fonctionnent selon le principe « si A, alors B », les systèmes agentiques évaluent plusieurs options d'action de façon simultanée, en tenant compte des objectifs, des conditions-cadres et des effets contradictoires. Cela permet une gestion plus fine, y compris dans des situations incertaines ou à fort enjeu.
- Ajustement de la cible : les flux de travail traditionnels sont plutôt rigides. Les systèmes d'IA agentique, eux, ajustent leur stratégie dynamiquement selon le terrain, qu’il s’agisse de ressources limitées, d’un changement de priorité ou de retours clients.
- ntelligence évolutive : les agents peuvent se greffer à l’existant pour apporter une piste de réflexion supplémentaire. Ils agissent comme superviseurs intelligents, pilotant ou optimisant les processus sans devoir les remplacer. Ils sont une évolution et non une rupture.
L’IA agentique ne remplace pas les outils traditionnels. Elle les complète en introduisant un niveau de commande et de décision plus performant et capable d'apprendre. De plus, il élargit et modernise judicieusement les solutions d'automatisation existantes tout en conservant la continuité opérationnelle.
Pourquoi est-il essentiel de s’y intéresser dès maintenant ?
L'IA agentique est sur le point d'entrer dans une phase d’adoption massive. Les entreprises qui en comprennent les principes, les applications et les conditions de déploiement se positionnent stratégiquement pour la prochaine vague de transformation numérique. Cela dit, il est important de garder des attentes réalistes. L'IA agentique n'est pas une solution miracle : elle ne remplace ni le leadership stratégique, ni l'empathie, ni le discernement humain dans des contextes éthiques complexes. Cependant, elle peut préparer les décisions, automatiser des tâches répétitives et rendre les processus plus intelligents et adaptatifs. Dans un environnement aussi réglementé que celui de la Suisse, notamment dans le secteur financier et médical, l’IA agentique offre une opportunité unique de faire émerger des innovations maîtrisées, traçables et conformes. Tout organisme qui souhaite non seulement digitaliser ses processus, mais également pérenniser la continuité de ses affaires, peut passer à l'étape suivante de la création de valeur grâce à l'IA agentique.
Pour en savoir plus, participez à notre webinaire
Dans le cadre de notre webinaire sur l'IA agentique qui aura lieu à l'automne 2025, nous aborderons ces sujets et bien d'autres. Retrouvez ici toutes les informations nécessaires ainsi que le formulaire d’inscription.
Vous souhaitez échanger avec nos experts ?
Nous concevons des stratégies et des solutions sur mesure parfaitement adaptées à vos besoins. N'hésitez pas à nous contacter directement via : data_ai@adesso.ch. Nous serons ravis d’échanger avec vous.
Cet article est le premier volet d’une série en trois parties consacrée à l’IA agentique (« Agentic AI »). Son objectif est d’offrir une compréhension stratégique solide de ces systèmes fondés sur des agents autonomes. Ce socle de connaissances vise à éclairer vos décisions en matière d’investissements et de développement. Plutôt que de s’attarder sur les aspects techniques, ces articles se concentrent sur des questions d'orientation pratiques et concrètes, en soulignant leur impact dans le cadre des décisions commerciales.
Cette série se compose des trois articles suivants, publiés consécutivement :
1. IA agentique : de quoi s’agit-il et comment fonctionne-t-elle ? (vous lisez cet article)
2. Comment fonctionne l’IA agentique concrètement ?
3. Quels cas d’usage pour l’IA agentique ?